Harcèlement moral : l’obligation de sécurité n’est pas sans limites
Quand la rigueur procédurale et la documentation permettent à l’employeur d’éviter la condamnation. Retour sur un cas concret.
Helene REYNIER
7/17/20252 min read


Quand l’employeur gagne (oui, ça arrive) : retour sur un arrêt peu courant
Dans les affaires de harcèlement moral au travail, on lit souvent que le salarié obtient gain de cause. Mais dans l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 15 mai 2024 (n° 23-22.121), c’est l’employeur qui s’en sort… et plutôt bien.
Décryptage d’un cas où la rigueur procédurale a fait pencher la balance.
⚖️ Les faits
Mme K, salariée en CDI, déclare être victime de harcèlement moral. À la suite de cette situation, elle est déclarée inapte à son poste puis licenciée. Elle saisit les juridictions prud’homales, reprochant à l’employeur un manquement à son obligation de sécurité.
Autrement dit : elle conteste non seulement le licenciement, mais aussi la gestion de la situation.
🛠 Ce qu’a fait l’employeur
Et là… surprise : l’employeur ne s’est pas contenté de rester passif.
Dès que le mal-être de la salariée a été porté à sa connaissance (en mars 2017), il a mis en place plusieurs mesures :
Suivi RH renforcé (entretiens hebdomadaires),
Mobilisation de la médecine du travail,
Enquête interne,
Intervention d’un psychologue du travail.
La Cour note que ces actions ont été prises sans délai et de façon cohérente.
💬 Ce que dit la salariée
La salariée, de son côté, reconnaît l'existence de ces entretiens RH… mais les décrit comme intimidants.
Elle affirme que les actions mises en place n’ont pas permis de faire cesser la situation de harcèlement.
Problème : peu, voire pas de traçabilité de son vécu. Aucune pièce probante n’est versée aux débats pour démontrer l’inefficacité des mesures, ni le caractère dégradant ou délétère de son environnement de travail.
Or, en matière de harcèlement, la preuve est essentielle. Et ici, c’est précisément ce qui a fait défaut.
👀 Un grand absent : le CSE
Autre point frappant : aucune mention d’intervention du CSE.
Ce dernier aurait pu :
Proposer des mesures alternatives,
Interroger la direction sur l’efficacité des actions mises en place,
Éventuellement alerter ou saisir l’inspection du travail.
Mais rien dans la décision ne laisse penser qu’il ait agi.
Alors : absence de CSE ? Mauvaise coordination ? Inertie ?
Difficile à dire sans connaître le contexte exact, mais cela interroge.
📌 Ce qu’il faut retenir
L’obligation de sécurité n’implique pas un résultat, mais une démarche active, documentée et cohérente.
Le manque de traçabilité peut coûter cher à un salarié, même dans un dossier sensible.
Le rôle du CSE peut être décisif… à condition d’être mobilisé.
📣 En formation, on en parle
Cet arrêt est un bon support pédagogique pour comprendre :
Comment documenter une situation de souffrance au travail,
Ce qu’on attend réellement d’un employeur,
Et le rôle (souvent sous-estimé) du CSE dans ce type de dossier.
👉 Vous êtes représentant du personnel ?
On explore ensemble ces situations en formation : cas pratiques, réflexes à adopter, erreurs à éviter.

